Le « devoir de vigilance » est apparu pour assurer un contrôle du respect, par certaines entités, étatiques ou privées, de la protection de l’environnement, des droits humains ou de la santé des consommateurs. Les principales règles ou applications se déclinent en règles de « soft law » ou de droit posé, internationales ou internes.
Conventions fondamentales de l’OIT (1998). Ces huit conventions (convention nº 29 sur le travail forcé, 1930, convention nº 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, convention nº 98 sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, convention nº 100 sur l’égalité de rémunération, 1951, convention nº 105 sur l’abolition du travail forcé, 1957, convention nº 111 concernant la discrimination, 1958, convention nº 138 sur l’âge minimum, 1973, convention nº 182 sur les pires formes de travail des enfants,1999), sont regroupées en quatre rubriques principales garantissant un « plancher » social dans le monde du travail : la liberté d’association et la reconnaissance effective du droit de négociation collective ; l’élimination de toute forme de travail forcé et obligatoire ;
• l’abolition effective du travail des enfants ; l’élimination de la discrimination en matière d’emploi et de profession.
Principes directeurs des Nations unies relatifs aux droits de l’Homme et aux entreprises (2011) dits « Principes de Ruggie ». Les Principes de Ruggie se fondent sur la logique « protéger, respecter, remédier» et constituent les éléments de soft law visant à responsabiliser les États et les entreprises, indépendamment de leur taille et de leur secteur, au regard des droits de l’Homme.
Principes directeurs OCDE (2011) à l’intention des entreprises multinationales. Ces principes constituent un ensemble de recommandations adressées par les pays membres de l’OCDE aux entreprises multinationales pour les inciter à adopter un comportement responsable dans leurs actions. Adoptés en 1976,la Déclaration de l’OCDE sur l’investissement international et les entreprises multinationales est ainsi complétée par ces Principes. Une première partie identifie des Principes directeurs, une deuxième des procédures, dont un Point de contact national (PCN) devant veiller à leur effectivité. En 2002 on comptait 51 pays y adhérant, les 38 de l’OCDE et d’autres non membres de l’OCDE (dont l’Ukraine depuis 2017). La révision des Principes directeurs en 2011 a permis d’introduire le concept de devoir de diligence des entreprises accompagné d’un guide ainsi qu’un nouveau chapitre sur le respect des droits de l’homme.
Proposition de directive (2022) sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité. En cours d’adoption, la directive devrait viser les entreprises de 500 salariés en moyenne et réalisant un chiffre d’affaires net de plus de 150 000 000 € et créer un devoir de vigilance « pour atténuer de manière adéquate les incidences négatives potentielles sur les droits de l’homme et les incidences négatives sur l’environnement » (art. 7) (V. aussi la Communication sur le travail décent dans le monde).
C. com.(FR), art. L. 225-102-4. Adopté par la loi française sur le devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre du 27 mars 2017 (loi n°2017-399), elle vise les « grandes entreprises », celles employant, en leur sein ou dans leurs filiales, au moins 5 000 salariés en France ou au moins 10 000 salariés dans le monde. En substance, il leur est fait obligation de prendre des mesures de vigilance raisonnable afin d’identifier et de prévenir les atteintes graves envers les droits humains, les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes ainsi que les atteintes à l’environnement via un plan de vigilance : « le plan comporte les mesures de vigilance raisonnable propres à identifier les risques et à prévenir les atteintes graves envers les droits humains et les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes ainsi que l’environnement, résultant des activités de la société et de celles des sociétés qu’elle contrôle au sens du II de l’article L. 233-16, directement ou indirectement, ainsi que des activités des sous-traitants ou fournisseurs avec lesquels est entretenue une relation commerciale établie, lorsque ces activités sont rattachées à cette relation« . Elle présente une vocation extraterritoriale et concerne toutes les activités de l’entreprise, des sociétés qu’elle contrôle directement ou indirectement ainsi que les activités de ses sous-traitants et fournisseurs. V. aussi le Guide thématique de la DAE (Direction des Achats de l’Etat.
Affaire TotalEnergies/Ouganda TJ Paris (réf.) 28 févr. 2023 n° 22/53942 et n° 22/53943, D. 2023, p. 975 obs. V. Monteillet et G. Leray, JCP E 2023, 1086, note J.-B. Barbieri, Dalloz actualité, 7 mars 2023, note. C. Hélaine, 13 avr. 2023, note O. Ilcheva. V. M. Hauterau-Boutonnet et B. Parance, « Prudence dans l’analyse du premier jugement sur le devoir de vigilance des entreprises ! », JCP G 2023, act. 373. Dans cette affaire, une filiale de TotalEnergies en Ouganda envisage de développer près de 300 puits de pétrole, construire une usine de traitement du brut et un oléoduc enterré entre l’Ouganda et la Tanzanie. Dénonçant ce projet développé dans un Parc nationale plusieurs ONG engageait une action devant le juge français, en référé ici, pour faire cesser ce projet, en raison de non conformité avec le plan de vigilance de TotalEnergies,considérée ici comme irrecevable en raison du défaut de mise en demeure par les demandeurs des griefs qu’ils auraient pu formuler du Plan de vigilance de Total de 2021, lequel était précisément contesté par l’action engagée, distincts « de manière substantielle » des griefs formulés à propos du plan de 2019.